Peut-on refuser de travailler en raison du froid ?
Quel est le cadre juridique du froid sur le lieu de travail ? Le salarié peut-il décider d'arrêter de travailler s'il estime que le froid (ou la canicule) représente un danger pour sa vie ou sa santé ? La question est forcément complexe puisqu'elle fait appel à des notions subjectives de ressenti en fonction de différents critères et de situations différentes. Comme en cas de canicule, s'il existe des recommandations, la possibilité d'utiliser sont droit de retrait tient donc plutôt de la bonne foi plutôt que de règles strictes. Bien évidemment, la question se pose aussi s'il fait trop chaud et, dans ce cas de figure, nous vous invitons à lire l'article consacré au droit de retrait par temps de canicule.
Un motif raisonnable du salarié
Le droit de retrait en raison du froid se base sur les mêmes règles et recommandations que lorsqu'il s'agit de canicule. Comme souvent dans le code du travail, c'est le caractère "raisonnable" d'une décision qui va être observé : si le froid est tel qu'il représente un danger grave pour la vie du salarié et/ou qu'il l'empêche de pratiquer son activité correctement, alors il peut exercer son droit de retrait, décider d'arrêter de travailler, et, si nécessaire, quitter les lieux pour se mettre en sécurité.
Pour cela, le danger doit être grave et imminent : bien que cette appréciation soit subjective, les juges pourront vérifier en cas de contentieux si le salarié avait un motif raisonnable de penser qu'il était en danger. Par exemple, travailler par une température inférieure à 5°C peut être considéré comme un risque immédiat en toutes circonstances. En revanche, une température de 15°C peut être parfaitement raisonnable pour des employés pratiquant une activité très physique alors qu'elle peut être beaucoup trop basse pour une activité de bureau très sédentaire.
Rappelons que la sensation de froid n’est pas strictement liée à la température mesurée : elle peut être accentuée par différents facteurs comme la vitesse du vent et l'humidité.
La responsabilité du salarié
L'application du droit de retrait se fait à l'appréciation de l'employé pour sa propre santé. S'il n'a pas besoin d'attendre de retour ou d'autorisation de son employeur pour quitter son poste, il doit en revanche toujours prévenir son employeur avant de le faire. La seule situation où l'employé ne peut quitter son poste sans attendre d'autorisation est celle où il risque de créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent (s'il manipule par exemple des machines qui ne peuvent être laissées sans surveillance).
D'autre part, s'il peut être légitime pour un employé de quitter son poste si le danger est immédiat, il doit aussi faire preuve de bonne foi et alerter son employeur dès qu'un problème se présente (chauffage en panne, fenêtre bloquée, etc...) afin que ce dernier puisse avoir une chance de régler le problème avant qu'il devienne dangereux. Pour cela, il peut passer par les représentants du personnel, la médecine du travail voire l'inspection du travail. Ainsi, s'il s'agit d'un devoir pour l'employeur, on préférera parler d'un "droit" d'alerte pour l'employé. À titre de comparaison et suite à une circulaire de 2009, le salarié n'est pas non plus autorisé à user de son droit de retrait en cas de pandémie grippale.
Le devoir d'alerte de l'employeur
Par ailleurs, l'employeur doit alerter en cas de situation grave et dangereuse et l'information doit être communiquée préalablement ou simultanément à cette situation. Si celle-ci persiste, alors l'employeur est dans l'impossibilité d'exiger le retour du salarié ayant exercé légitimement son droit de retrait : aucune sanction ni retenue sur salaire ne peut être prise à l'encontre d'un salarié (contrairement au droit de grève par exemple). L'employeur ne peut modifier le règlement intérieur afin de mettre en place des dispositions visant à restreindre l'usage du droit de retrait.
De manière générale, en cas d'environnement froid ou de vague de froid annoncée, l'employeur est tenu de mettre en place un certain nombre de mesures pour réduire ou supprimer les risques liés au froid.
- Adapter les conditions de travail : limiter le temps de travail au froid et exercer une rotation sur les postes exposant plus au froid.
- Adapter les horaires de travail en les limitant ou favorisant les heures plus chaudes de la journée par exemple.
- Former les employés aux risques du froid : savoir reconnaître les signes de l'hypothermie, les engelures, etc...
- Equiper ses salariés en fonction du froid qu'ils risquent de rencontrer : vêtements de protection, gants, coupe-vents, etc... et s'assurer qu'il y en a assez pour tout le monde.
La température des locaux
Il n'existe pas de règle précisant à partir de quelle température un employé peut faire jouer son droit de retrait. Il est seulement dit que les locaux affectés au travail doivent être chauffés à une température convenable pendant la saison froide. Ainsi, l'employeur doit prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer la protection des travailleurs vis à vis du froid.
Concrètement, selon les recommandations de l'INRS, un environnement de travail est considéré comme froid en-dessous de 18°C. Cependant les conditions idéales sont différentes en fonction du type d'activité.
- Dans un bureau avec une activité sédentaire, les conditions (idéales) de confort thermique se situent à une température comprise entre 20 et 22°C.
- Pour une personne effectuant une activité physique moyenne, elles se situent à une température comprise entre 16 et 18°C.
- Pour une personne effectuant une activité physique soutenue, elles se situent à une température comprise entre 14 et 16°C.
Dans tous les cas, l'humidité relative idéale est de 50%.
En revanche, s'il a l'obligation de chauffer les locaux, l'employeur n'a pas à veiller au bien-être des salariés en cas de froid, même si le code du travail lui impose d'obtenir l'avis du médecin du travail, du comité d'hygiène, du CHSCT ou des délégués du personnel.